SIXIEME CHAPITRE

LA DISPARITION DE L’ETAT

C’est la question la plus claire pour tous les « socialistes de chaire, socialistes de l’Etat » et leurs amis. Ils savaient tous qu’un jour l’Etat disparaîtra. Et c’est justement ‘un jour’ – dans le futur lointain et imprécis. Cette disparition était perçue comme une notion vague et dans un temps indéterminé, qui, dans tous les cas n’avait rien à voir avec le moment actuel et avec nous. Le moment n’en était pas venu et pour cela  on le « renvoyait » au futur lointain – à la victoire définitive des rapports de production socialistes, quand les toilettes même seront en or et quand la productivité sociale du travail socialiste prédomine à celle du capitalisme. Voilà pourquoi, si l’on juge suivant la victoire définitive du socialisme chez nous, proclamée par le Programme du Parti Communiste Bulgare, bien que les toilettes ne soient pas en or (mais l’argent n’a pas d’odeur), et la productivité du travail n’est pas devenue plus haute que celle du capitalisme de l’Ouest, il faudrait quand même que l’Etat eut commencé à disparaître. Rien de cela !

On ne peut pas attendre que l’Etat se mette à disparaître après la victoire économique sur le moyen de production capitaliste. Cette quintessence de « dernière instance » est une sottise, indigne d’éloge, une vide jonglerie de mots. La disparition de l’Etat et l’accroissement de la productivité sociale du travail socialiste – c’est un processus indivisible. C’est justement par la disparition de l’Etat que la productivité du travail peut accroître orageusement, à rythme révolutionnaire et dans de courts délais. Il ne faut pas que la productivité du travail accroisse et puis l’Etat disparaisse, mais l’Etat doit disparaître pour que la productivité du travail accroisse à rythme accéléré pour montrer les « avantages du socialisme » en tant que système plus progressif et économiquement plus fort. Au contraire – avec l’accroissement de l’appareil de l’Etat la productivité du travail diminue continuellement – de manière absolue et relative. Le fonctionnarisme et le militarisme entravent le développement de toute société mais ils sont le plus durs vis-à-vis à la marche libre du socialisme.

L’injustice sociale dans le cadre de l’Etat est résultat de la dictature d’une classe dans la société. C’est pour cela que l’injustice sociale au socialisme est résultat de la dictature de la classe ouvrière, établie conformément à son intérêt pour la disparition de la bureaucratie des employés. Cette mesure de la Commune de Paris est le premier pas à la disparition réelle de l’Etat.

La violence de la classe disparaissante est adressée contre elle-même, contre ses institutions – fonctionnarisme, armée, police (et non sous la forme de violence mais en tant que politique économique) – qui, malgré leur nouveau contenu, représentent des poisons cachés à l’action lente, mais sure. Et à l’effet conséquent. Ils peuvent reproduire la bureaucratie avec son effet dangereux de « virus ». La violence de l’Etat socialiste est nécessaire pour ouvrir le chemin du progrès, pour devenir un moyen de vivre, une habitude de « l'introduction du nouveau », comme on disait avant. La disparition de l’Etat signifie le progrès scientifique et technique à être utilisé et dirigé de manière ou plus de forces de travail soit engagées au travail producteur et non pas à des obligations bureaucratiques. Alors la gestion de la société aurait graduellement cédé à son autogestion – « une gestion agréable, sans gouvernement »[1].

Bien sur, au début même du socialisme – immédiatement après la victoire de la révolution socialiste – cette disparition sera très lente, extrêmement difficile et pour cette raison à peine perceptible, ayant en vue l’environnement du capital international, si la révolution vainc dans un seul Etat arriéré, au lieu de quelques pays avancés. Mais elle doit commencer ! Parce que « le prolétariat nia besoin que d'un Etat en train de disparaître, c’.à.d. un Etat, structuré de manière ou il est prêt à commencer à disparaître et qui ne peut pas éviter sa disparition ». (Lénine, Vol.33, l’italique à nous).

La classe ouvrière a vraiment besoin de cet Etat précisément . qui est prêt à commencer à disparaître et qui ne peut pas éviter sa disparition ! C’est seulement alors et pour cela que l’Etat socialiste est « semi-Etat », « Etat non pas au sens propre du mot », comme Engels l’appelle – parce qu’il est en train de disparaître.

Aujourd’hui de nouveau, tout comme il y a 140 ans, tout comme il y a 75 ans, la disparition de l’Etat est perçue de manière sotte et ironique par certain cercles incultes en tant que abolition de l’Etat dans un même jour, sous disparition on comprend … liquidation de l’Etat et c’est pourquoi la demande de tel socialisme est représentée comme … anarchisme et nihilisme. Une telle « conception » ne fait que prouver sa distance infinie du marxisme.

L’Etat est nécessaire au développement faible des forces productrices et une faible conscience sociale de la société primitive justement pour développer les forces productrices et pour élever la conscience sociale. Cependant, à un stade de leur développement il cesse d’être nécessaire et il doit « s’éteindre ». L’inégalité sociale en la personne de la propriété privée a mené à l’injustice sociale et la violence personnifiées à leur tour par l’Etat. Pour que la société, encadrée dans un Etat, soit de retour au point de départ, mais au degré supérieur, il faut suivre la direction inverse – par l’injustice sociale à l’égalité sociale. De cette manière, dans la nouvelle société sans classes – le communisme –  la spirale de l’évolution est fermée, mais au degré supérieur suivant. De nos jours l’Etat est le plus grand malheur de la société, héritée des siècles.

La disparition de l’Etat concerne toutes les organisations politiques à son sein, y compris le parti même qui avait réalisé la révolution socialiste. C’est une disparition de la politique et du droit en général. Cela veut dire, que le but final de ce parti est l’élévation de la conscience de la société entière au niveau des leaders communistes et non pas un accroissement continue en nombre des « communistes » par leur documents, des membres du parti qui se sont forgé « un bouclier de la religion et, sous ces vêtements estimés, se sont gagné le droit d’être les pires hommes du monde »[2]. Cela veut dire élever la conscience sociale à un degré ou  il n’y aura pas besoin d’une organisation politique spéciale – le parti, ou « avec les autres vices, les racines de l'amour-propre de la fragmentation du parti »[3] seront arrachées. Et cela, de son coté veut dire, que la société communiste est une société … sans communistes !

Dans son livre « La grande initiative » Lénine recommande un rapport entre parti et classe pour élever la conscience sociale dans le cadre de l’Etat socialiste – ayant à ce temps-là une classe ouvrière en Russie de 4 millions, le parti doit comprendre 100 000 ou 200 000 de membres. En Bulgarie en 1989, le Parti communiste bulgare avait 984 000 membres contre une classe ouvrière de moins de 2 millions ! ! Un délayage incroyable, ayant mené à l’image du membre du parti à ce temps – paresseux et omnivore comme un moine bénédictine ! Le communisme a son expression non pas dans l’accroissement de l’appareil du parti, comme cela a été jusqu’ici, non pas dans son délayage, mais dans son restriction dans le temps, non pas par le nombre des communistes officiels, mais de ceux en dehors d’eux – par le niveau de la conscience sociale. La disparition de l’Etat veut dire transformer la société à caractère hiérarchique en société à caractère synodal.

Le trait le plus caractéristique d’un Etat socialiste est que cet Etat est en train de disparaître. La disparition de l'Etat est exprimée en l’accroissement continu des ouvriers, et surtout de ceux à haute qualification, tandis que la mort, c’.à.d. la putréfaction de l’Etat s’exprime en l’accroissement continu des employés et surtout des petits. L’Etat est nié dans tous le deux cas, mais alors que dans le premier cas il est une négation de la négation, parce que la société est libérée de l’Etat, dans le deuxième cas il ne s’agit que d’une négation nue, parce qu’elle est un suicide inévitable. Si le capital ne serait pas arrêté, cela sera fatal dans le futur proche et non pas lointain. La partie esclave de la société ne différerait pas du torrent commun des choses – des objets et des hommes seront une masse cultivable pour le capital. La société, divisée en elos et morloks[4] sera un cadavre agonisant. Des ordinateurs et de biorobots, une fécondation artificielle et une « amélioration » du gène  dans le but de produire de bons citoyens et de braves soldats, un lavage des cerveaux, effacement de la mémoire, c’.à.d. changement de la conscience, du « Je » propre – tout ce coloris terrifiant de manipulation d’une société futuristique technotrone, science-fiction maintenant, une société dans laquelle l’Etat a supprimé toute résistance dès son germe. La vie humaine ne va rien valoir et des qualités morales comme devoir, honneur, conscience, dignité vont simplement perdre leur sens et seront effacées et oubliées par la conscience sociale. La violence barbare cédera à la silencieuse et fine régulation totalitaire du comportement de l’homme dans la société. Les arsenaux nucléaires et les bâtons policiers deviendront drôles et inutiles, des jouets vieillis et taillés à faire peur. La science dans les mains de l’Etat mènera inévitablement au suicide de la civilisation humaine – n’importe que ce soit soudainement ou après une longue agonie. Le fascisme, mené à son stade extrême et changé à ne plus le reconnaître, provoquera une autodestruction en tant qu’une maladie auto-immune. Voilà pourquoi la disparition de l’Etat est une condition nécessaire et suffisante au mouvement de la société en avant et en haut, pour de développement libre de la société humaine comme une civilisation cosmique de deuxième ou troisième type.

L’unité dialectique de possibilités et de nécessités veut dire qu’il peut y avoir des intérêts dans la société sans classe aussi, et pas seulement dans l’Etat. De nos jours l’intérêts n’est perçu qu’une mesure pécuniaire, seulement de son coté vulgaire et matériel, comme un sens commercial suivant la maxime « l’intérêt ôte le chapeau » ! Les intérêts dans le cadre de la société sans classes ont une base toute différente et c’est pour cela qu’ils ont un contenu tout différent.

L’esclavage mur a donné les premières idées d’une structuration sociale idéale – Platon, « L’Etat ». Le féodalisme mur a donné le socialisme utopique – More, Campanella. Le capitalisme mur a déjà donné le communisme scientifique – Marx, Engels. Aujourd’hui il est temps à poser le début de la réalisation de ces idéaux.

Le communisme est une société à structure cristalline, et non pas amorphe. C’est le temps ou la société ne sera plus idéalistique et l’individu sera une personnalité sociale. Le communisme est une société parfaite et pas un Etat idéal ! Le communisme est une société supérieure et la dictature du prolétariat est un chemin, et surtout le chemin unique à la société supérieure. C’est le temps ou la seule organisation de la société humaine sera ONU – l’Organisation des Nations unies ; alors, ou « ce fameux argent heureux »[5] sera mort ; alors, ou même les toilettes, selon Lénine, et les pots de nuit, tout comme pour les utopistes, seront en or ; alors, ou la Terre sera la Ville du Soleil, quand la société humaine représentera une puissante raison planétaire – c’est l’époque de la noosphère. Et si dans l’évolution de la Nature l’homme est le dernier degré connu de la substance hautement organisée avec l’unité constructive – la cellule, la société sans classe est un degré qualitativement nouvelle, le suivant degré supérieur de l’organisation de la substance à l’unité constructive - l’homme. Mais dans ce but il n’est pas suffisant que le monde soit expliqué. Parce que « les philosophes ont seulement expliqué le monde de manières différentes, le problème est de le modifier ».[6]



[1] Platon, « L’Etat »
[2] Molière, Don Juan.
[3] Thomas More, Utopie.
[4] Herbert Wales, La machine du temps.
[5] Thomas More – Utopie.
[6] Marx, Thesis de Fauerbach, vol.2.

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